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face au vent-avel a benn
27 août 2007

le ciel dans le ciel...

Suite du récit commencé ici (lisez dans l'ordre sinon vous vous perdrez!!)

8h du mat. J'ai du attendre aussi tard, car dans ma fuite rapide vers l'Est hier je n'ai pas pris le temps de m'arrêter au supermarché. Je pensais le faire à Langres, mais les bouchons parisiens m'ont fait y arriver trop tard.
Sans appareil photo numérique je me sens frustrée. Alors je vais acheter un jetable, que je ferai tirer (bonjour la qualité!!) et j'espère pouvoir faire numériser les photos sans me ruiner, car je n'ai pas de scanner.
La jeune fille de la boutique qui fait office d'office du tourisme/magasin de sport/souvenirs/chocolat glaces etc tique en me voyant.
Elle doit se dire: j'ai déjà vu cette fille quelque part, et si elle se souviens "mais c'était il y a 10j" elle doit se demander ce que je fais encore là, et sans mes enfants.
Inutile de tenter une explication.

J'attaque la montée vers Pfälzerhütte. Donnée pour 2h30, sur la base du pas d'un randonneur moyen.
Je vais mettre 1h35 et je sais que je peux monter bien plus vite, car là j'ai le coeur dans le rouge à cause de la fatigue.

Je reviens deux secondes sur les raisons de ce retour ici:

1) l'irrésistible "appel", qui  ne se nomme pas, et auquel on doit répondre.
Et plus concrètement:

2) terminer l'ascension du Naafkopf, car je déteste faire demi tour.
3) Voir

Car à l'aller, avec les enfants, nous avions emprunté ce sentier tortueux et raide dans le brouillard le plus total. Aux deux tiers de la durée, à Täli Höhe, environ 2050m, nous avions rejoints un groupe de marcheurs, puis descendu légèrement à flanc de montagne sans rien voir avant de remonter vers le refuge à 2108m.
Et je "sens" que de Täli Höhe la vue devait être énorme... 1er degré.
Si l'on cherche à aller plus loin,  retourner voir ce que l'on a traversé dans le brouillard, c'est assez fort, même si on était sur, à ce moment, qu'il y avait quelque chose d'immense derrière le brouillard.

58min pour arriver à Täli Höhe, et je reste un long moment, silencieuse, face à la barre montagneuse qui s'étale face à moi.
Sur la gauche, l'Augstenberg 2365m que nous avons grimpé avec les enfants. Sur ses flancs, le sentier qui file vers le refuge.
Et face à moi la ligne continue, déchirée, des plus hauts sommets du Liechtenstein, 

Avec d'Est en Ouest:
le Naafkopf, 2570m et son avancée vers le Nord (Rotwand, 2400m), Schwarzhorn 2502m, Hinter Grauspitz 2574m, Vorder Grauspitz (point culminant du pays) 2599m, Falknis 2560m, Mazorakopf, Falknishorn 2451m.

Pour ceux qui ont gentiment baladé autour du Mont Blanc, ou simplement roulé sur les routes alpines en passant le Galibier à 2650m environ, çà parait ridicule.
Bah... Ici point de routes qui grimpent à 2600m! A partir de 1600 seuls des sentiers mènent aux sommets, et à 2500m les roches sont si acérées qu'y poser les fesses troue le pantalon...
Ici, à partir de 2000m la végétation est dense (fleurs alpines) mais rases, et on s'accroche aux pentes comme on peut. Ensuite commence l'étage des pierres, des grosses, et des pentes couvertes d'éboulis.
Ce n'est certainement pas "de la haute montagne", si on se réfère aux +de4000 des Alpes, ou aux 8000 d'Asie, mais ce n'est pas du tout de la balade post gros déjeuner du dimanche pour digérer.
De Malbun jusqu'au sommet du Naafkopf, il y a 1000m de dénivelé +. Bref, vous posez votre voiture au Galibier, vous trouvez un sommet de 3600m et vous y allez.
Et naturellement, pour grimper, il faut souvent descendre rapidement ce que l'on a mis un certain temps à monter, pour  se le refaire en dessert un peu après.

Humble vermisseau que je suis...
Les pattes habituées aux sentiers allemands, déjà pentus, mais si sécurisés à côté de çà!
Là bas, pour se perdre faut le faire exprès. Ici, le balisage est présent, mais parfois 2 peintures sur roches sont si éloignées qu'il faut de bon yeux pour deviner la voie à suivre. çà m'avait fait sourire, sur un site rando suisse de lire: pour randonneurs expérimentés, et ayant une bonne vue (en parlant d'un truc de ouf que je ne ferai pas, du moins pas pour l'instant)
L'humble vermisseau est là pour apprendre.

A Pfälzerhütte je souffle 5 minutes et je décide de filer vers le Naafkopf, car vu mon état de fatigue, çà ne va pas s'arranger avec les heures qui passent.
Pas de photos pour  l'instant à vous montrer, çà viendra.
Je rejoints sans difficulté l'endroit où nous avions rebroussé chemin avec les enfants. Le fait d'être seule aide: je n'ai pas peur de voir mes enfants tomber, j'ai juste peur.. de tomber!
Certains me diront: le Naafkopf? aucun risque!!
Et oui... ils sont nés ici, ont le teint des hommes et des femmes grandis au soleil de la montagne. Le Naafkopf ils se le grimpent en courant après le p'tit dej, et redescendent au galop. Si si, je l'ai vu faire!! Epoustouflée que j'étais.

Le sentier mesure une trentaine de centimètres de large, et est tracé le long d'une pente en éboulis.

Pour vous donner une idée, marcher là bas çà ressemble un peu à çà (enlevez les gros cailloux et remplacez par des éboulis):
photos trouvées sur ce site suisse
Ce n'est pas le Naafkopf mais çà pourrait l'être

pfalz4 lichtenstein1

Et au fil des mètres parcourus, çà se corse. Bientôt, adieu le sentier minuscule à flanc de pente!
C'est direct la pente, dans le sens montée bien sur, et à même l'éboulis.
Là le fait d'avoir des batons de marche est un handicap terrible: je ne peux pas les raccourcir pour les mettre dans le sac car ils sont vieux et grippés, et j'hésite à les laisser là car ils pourront être utiles plus haut.
Pour grimper, il faut se servir de ses deux pieds, et de ses deux mains. La pente est pleine de "graviers", impossible de poser ses pieds là dessus, faut tasser pour tenter de faire une petite place pour la pointe du pied, ou tenter de trouver une prise, un cailloux qui ne bouge pas, et qui ne bouge réellement pas! (certains sont vicieux)

Dans un passage court, mais qui me semble infranchissable, j'ai l'idée de stopper et de redescendre. Là haut, la croix me nargue..
Noméo!!! m'enguelais-je!! tu n'as pas fait 1200km et grimpé jusque là pour redescendre!!
Et puis... J'ai le ventre collé contre la pente, les pieds sur 2 minuscules pierres qui tiennent bon, les mains aggripées où je peux. Je ne peux pas redescendre!!! impossible de me retourner, de bouger, et çà me  paralyse de penser : pour descendre faudrait le faire en aveugle, tatonner avec les pieds pour trouver un cailloux.
Les "prises" un peu plus haut sont très hautes, pour quelqu'un qui mesure 1m62 et qui a des petites jambes.
Je me claque la figure virtuellement, et m'aidant des ongles, des coudes et des genoux je me hisse jusqu'à une autoroute: une pente brute faite de cailloux plus stables.

Là, je peste, envoie chier la pente, les cailloux, et moi par dessus le marché, et j'oublie totalement le risque, grimpant comme si je montais au 1er étage de chez moi.
La peur...
On ne peut pas dire que j'ai le vertige: près d'une falaise, je peux me pencher et regarder en bas.
Mais j'ai peur de tomber, çà oui, et je n'ai pas du tout le pied sur.
En montagne, j'ai vu des gens bien moins costauds que moi physiquement (je les larguais en montée) dévaler les pentes d'un pas léger, alors que j'étais au ralenti, tâtonnant.
Humble vermisseau...
Ici, pour frimer faut être un champion de marathon en montagne, et encore, ils ne friment pas.
Une pub disait: la montagne, çà vous gagne.
Ben ouais! çà vous gagne!! contre elle vous n'avez aucune chance! Elle vous laisse l'approcher, mais c'est à vous de veiller sur votre sécurité, et de ne pas faire de conneries.
Si certains croisements indiquent des durées en heures, et non des distances en km c'est qu'un km ne ressemble pas à un autre km.
Un km sur du plat, ce n'est pas un km à 30% de pente, dans un sens comme dans l'autre!
Et ici, mal évaluer la durée d'une rando, et mal évaluer ses forces et possibilités, peut amener à la cata: coincé, sans vetements chauds, épuisés, hypoglycémie, etc.

Revenons en au Naafkopf. Curieusement, la fin est plus facile. Je me balade sur un sentier étroit, oubliant le vide.
La peur, on ne l'oublie pas, on ne lui pisse pas à la raie: on ne fait que l'apprivoiser. Faire avec, assumer.
La dernière partie est un peu comme un superbe escalier de pierre, avec des marches de 50cm de haut.

J'arrive au sommet, même pas fière. Je n'ai fait aucun exploit, juste emprunté un sentier T4 et II en escalade
D'après le classement suisse, voici ce qu'est un T4: (références trouvées sur cet excellent site)

Trace parfois manquante. L'aide des mains est quelquefois nécessaire pour la progression. Si balisé: blanc-bleu-blanc. Terrain déjà assez exposé, pentes herbeuses délicates, pentes mêlées de rochers, névés faciles et passages sur glacier non recouverts de neige. Exigences: Etre familier du terrain exposé.Chaussures de trekking rigides. Une certaine capacité d'évaluation du terrain et une bonne capacité d'orientation. Expérience alpine. En cas de mauvais temps le repli peut s'avérer difficile.

Et les éboulis hein, ils sont où les éboulis???????
Pour info, voici ce qu'est un T5 : Souvent sans trace. Quelques passages d'escalade faciles. Si balisé: blanc-bleu-blanc. Terrain exposé, exigeant, pentes raides mêlées de rochers. Glaciers et névés présentant un risque de glissade. Exigences: Chaussures de montagne. Evaluation sûre du terrain et très bonne capacité d'orientation. Bonne expérience de la haute montagne et connaissances élémentaires du maniement du piolet et de la corde.

Bah, pour moi le Naafkopf, c'est du T4 avec risque de glissade!!!
Le Grauspitz, 2599m, tout à côté, c'est du T5. Il me semble si impossible à grimper!!

Là haut, la vue est époustouflante. La chaine des Alpes, des sommets enneigés, les vallées minuscules, l'air vif.
Une croix. 3 pays qui se rejoignent exactement là: Liechtenstein, Autriche, Suisse.

Voici quelques photos trouvées sur ce site en attendant les miennes
naaf17 naaf23

Moment de silence.
Que vous dire?
Que c'est beau? vous vous en doutez.
D'ici, je vois avec amusement les petits oiseaux voler plus pas, et je souris.
Misérable vermisseau...
Première expérience alpine, un sommet qualifié de facile par les habitués, pas de quoi se vanter.
Juste une paix intérieure immense qui m'envahit, loin de l'exaltation. Avoir atteint SON ciel.
Un bruit, lourd, très lourd et très lent battement d'aile. Un corbeau passe à ras de ma tête. Je ne sais pas si c'est du à l'altitude, mais les sons sont différents, ils résonnent.
Je le regarde évoluer. Il revient, bruit étonnant de bourrasque de vent, replie ses ailes, et pique vers la vallée.
Loin des clichés martelés à grands renforts de mots et de points d'exclamation, loin des envolées lyriques, je n'ai rien à dire.

J'ai encore une longue route à faire, avant de rejoindre ma voiture. Il faut penser à redescendre.
J'ai passé 20 minutes ici.
J'ai passé une vie ici.
Je redescend, pleine d'une vie nouvelle, ayant laissé beaucoup de moi accroché au ciel qui ne semble même pas blessé par ces arêtes rocheuses.
Je redescend, ayant emporté avec moi tant de lumière.... J'ai envoyé ma lumière vers le ciel, et le ciel m'a répondu, en un écho lumineux.
Oui!!! il y a des échos de lumière. Na. Faut juste aller les chercher un peu  loin, enfin, tout près, en soi.

Avant de partir, je me baisse, cherchant des yeux un cailloux, souvenir palpable du sommet.
Une arête, un sommet, 3 pays. Je n'ai pas besoin de chercher, il est à mes pieds: un petit cailloux gris, triangle parfait.
Suisse, Autriche, Liechtenstein, trinité, 3 frontières dérisoires, une seule montagne, et le ciel.
La pierre, le ciel, et moi. Trinité, 3 frontières dérisoires.
Je l'ai déjà écrit il y a quelques jours. Il y a le ciel, et la roche, et entre les deux cet état de grâce sur lequel nous marchons.
Même plus. Tout se rejoint...

Dans la descente, après le chaos rocheux du sommet, premier virage. Là, derrière un rocher, je vois une paire de cornes immenses qui dépassent.
Non!!!!!!!!!!!!!!!!!
J'en tomberais à genoux si  je n'avais pas si mal partout... Un bouquetin!! N de D!! mais c'est réputé sauvage ce bestiau là!!!
Une autre paire. J'avance un peu, et je les vois.
Ils sont 9!!! Allongés au soleil. Ils m'ont vue, ils ne bougent pas.
Plus bas, des randonneurs grimpent, plus facilement que ce que l'ai fait moi même. Habitués, le pas sur, maitrise des cimes.
Je pense que les bouquetins vont s'enfuir. Non.
Le Naafkopf est à eux.

Voici un bouquetin: (photo ici)
bouquetin33

Je continue à descendre. Je croise le regard des bêtes. Humble vermisseau que je suis...
Merci, une infinité de mercis.

La pente en éboulis est problématique quand on la prend dans ce sens là aussi.
J'applique la bonne vieille méthode du "je descends comme je peux", c'est à dire que je m'aide de la partie la plus charnue de mon individu: mes fesses.
Je ne vous raconte pas, d'ailleurs, l'état de mon fessier, ni celui de mon pantalon usé tout au long de ces heures de marche...

J'ai mis 50 minutes pour faire Pfälzerhütte - Naafkopf (donné pour 1h15).
Je mettrai... 1h10 pour le retour!!
En comptant la halte bouquetins, qui fut longue, et les haltes forcées pour laisser le minuscule sentier à ceux que je croise, priorité à ceux qui grimpent.
Le sentier à flanc de pente, légèrement en dévers, avec des passages larges comme... une seule largeur de pied me semble d'une facilité bizarre...
J'ai toujours peur, mais je maitrise. Concentrée, je file.

Je ne sais pas si je retournerai jusqu'à là haut un jour. Oui, certainement. Je verrai les choses différemment! En espérant ne pas tout avoir à reprendre à zéro, car c'est fou ce qu'on s'habitue vite à ce genre de sentier.
Celui qui me tente, maintenant, c'est le T5 du Grauspitz.
Mais pour cela il me faudra faire mes classes (je suis en train) et prendre du galon.
Misérable vermisseau de première classe Laouen, au rapport!!
Oui chef!!
C'est pas encore aujourd'hui que vous allez passer caporal première classe Laouen!
Non chef, la route est longue chef...

Allez, marche Laouen, marche...
(pour ceux qui doutent, oui, Forrest Gump est un de mes films favoris)

D'ailleurs, un misérable vermisseau doit se débrouiller encore mieux que moi: son absence de pattes le rend moins sensible au vertige.
Faudra que je pense à grimper le Grauspitz en rampant moi...

Descendre me fait mal aux pieds, alors que l'effort d'une ascension passe sans encombre. Fou ce que je souffre des pieds, malgré une habitude certaine à marcher, et à souffrir, je n'y peux rien.
A Pfälzerhütte, je fais la pause miam, en buvant un thé corsé.

D'ici, je regarde le Naafkopf avec une tendresse certaine.
Je ne me dis pas: bravo Laouen, tu as vaincu la montagne!!
Quelle idiotie de penser un truc pareil... Même un alpiniste arrivant sur un 8000m devrait rester humble au sommet.
Personne ne vainc la montagne, on se vainc juste soi même, en se portant un peu plus haut.
La montagne m'a juste permis de trouver en moi la force de dominer cette peur pour atteindre ce petit, ce tout petit sommet...
C'est l'Amour qui m'a portée. Rien de plus.

Et à ceux qui encore et toujours se demande: "l'amour pour qui?" je réponds encore une fois:
l'Amour. pour qui ou pour quoi la question ne se pose pas. Pas si il y a un A, en tête du mot.

Pas du tout envie de redescendre à Malbun maintenant.
Alors je descend le long du flanc autrichien du refuge, sur le sentier tortueux qui mène à une vallée minuscule et encaissée, vers les villages autrichiens de Nenzinger, et Himmel.
Voici un joli site sur le village, avec plein de photos, cliquez ici.
Je remarque avec amusement que mon téléphone refuse le réseau autrichien, ou l'inverse. Plus aucun risque ici, je marche sereinement, observant avec émerveillement la flore alpine.
Je ne connais pas un dixième des  plantes qui poussent ici, mais on croirait un musée botanique!
Après une très très longue descente à flanc de montagne, face au Panüeler Kopf, un des géants du coin 2859m, j'atteins l'étage où les arbres ont le droit de pousser.
Je souris en pensant aux Bannwald allemandes, ces espaces forestiers protégés où l'homme n'intervient pas et où les arbres et plantes vivent et meurent librement.
Ici, le pays et sa topo sont tellement rudes qu'il ne viendrait à aucun homme l'idée d'intervenir dans la nature.
Tout pousse, vit et meurt librement. Les arbres ne sont pas exploités pour le bois car aucun camion ne viendrait les chercher.
Quelques rarissimes chalets sont batis dans la vallée. Rien de plus. Personne. 2h ou 3h de marche mini avant de rejoindre un lieu habité, refuge ou village comme ici à Himmel.
Je sens que je vais faire un caprice... je veux un chaleeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeet!!!!!!

Sur la pente, des conifères très très âgés. Je me souviens du diamètre des sapins abattus en Forêt Noire. J'en avais déniché un de 160ans.
Ceux ci sont bien plus imposants encore, et vu les conditions très rudes de pousse, certainement beaucoup plus vieux.
La pente, les rochers, le vent, tout s'est ligué contre eux pour leur donner parfois des formes torturées. Courbés, ou à plusieurs troncs, ils tiennent bon. Certains géants ont poussé droit, bravo!
Je découvre plein plein de jeunes cèdres, et j'ai l'impression d'être une botaniste découvrant une espèce encore inconnue.
Pour tout vous dire, Laouen a écrit, comme mémoire de fin de licence, un mémoire nommé "étude d'une pullulation de la Tordeuse du Sapin, Chorisoneura murinana Hb. dans un peuplement de cèdre de l'Atlas.
Juré, çà ne fait pas mal d'écrire un truc comme çà... :-))
Le cèdre, c'est mon conifère favori bien entendu!!
J'ai complètement oublié comment on différencie les différentes espèces de cèdres (en gros, Atlas, Liban, Chypre, Himalaya) mais ceux ci sont à port souple, légèrement tombants, aux aiguilles longues et fines, et il me semble que ce sont des cèdres de l'Himalaya.
Et là... Vu qu'ils ne sont pas originaires d'ici, faut bien que l'homme ait planté les premiers!
En tout cas, ils vivent et meurent librement, et de nombreux petits cèdres poussent sur les pentes, au milieu du bois argenté presque "fossilisé" de leurs ancêtres morts.

En rejoignant le hameau de Himmel, je découvre une cascade superbe, d'une  hauteur imposante. Photo à venir j'espère, mais sur le site cité plus haut vous les découvrirez. (il y a pas mal de cascades par ici)
Himmel...
Pour arriver ici, en venant de Pfälzerhütte: 750m de dénivelé négatif!
Himmel, en allemand, signifie "ciel".
Le ciel est ici descendu sur la Terre. Des paturages, des vaches, quelques maisons de bois, une chapelle. Magnifique!!

Mééééééé... Malbun est loin, très loin.
3 heures de marche indique le panneau.
Car nous sommes à 1350m environ, et il me faut grimper jusqu'à 2000m environ, pour redescendre ensuite sur Malbun à 1600m.
Avec un immense sourire, je fais l'addition: je vais donc me taper 1800m de dénivelé positif aujourd'hui!
Sur 7h-7h30 de marche environ. Aucune idée du nombre de kilomètres, entre 20 et 25, mais çà ne veut rien dire, je ne veux même pas savoir.

La remontée vers Malbun est épique. Une succession de minuscules lacets, 50m dans un sens, un chaos, virage à 180°, 50m dans l'autre. Ou comment passer de 1600m à 1800m en 500m... ou presque.
Là, être en groupe ne changerait rien: aucune conversation possible sauf si né avec un coeur et des pattes de bouquetin!
Et ici, j'en ai vu, des gens capable de blablater sans stopper une seconde dans des pentes atroces.
Moi, je ne peux pas:
1) je suis seule
2) même accompagnée, je n'en aurais pas envie: la montagne s'apprécie dans le silence. Seul le bruit des pas et le boum boum du coeur rythme le temps.
Sur ces pentes, pas 36 solutions, on tire la langue, on souffle, et surtout, on évite de porter un cardiofréquencemètre sinon il explose.

Sareis. 2000m. Malbun est tout en bas. Je descend aussi vite que possible (mes pieds ont bobo!!).
En bas, j'achète un autre appareil jetable pour le lendemain, car demain je repars sur les sentiers.

J'avais pensé initialement à me faire une étape du Rätikontour, un truc de fou, vers Mannheimer Hütte et de Schesaplana (près de 3000m)  mais c'est du très très costaud...
voici une photo par exemple, toujours tirée du site suisse dont j'ai donné le lien plus haut.

lichtenstein3_b

Alors je me suis rabattue sur du plus facile, bien que comportant des passages où il est bon de mettre sa peur dans sa poche avec son mouchoir dessus.
Je vous en parle dans le prochain post.

17h15, je quitte Malbun, et je redescends vers la plaine. Malbun est un village où je me sens bien, et curieusement je ne me retourne pas pour le saluer en partant. Dans ma petite tête se passe un truc dont je n'ai pas encore conscience...

Ce soir, je vais dormir à Schaan, à l'auberge de jeunesse de Vaduz. Besoin de repos, et d'une bonne douche!
Même pas le courage d'aller flaner à Vaduz après la douche. Faut dire que j'ai mal aux pieds...
Pourtant, je n'aurais pas eu honte de déambuler dans les rues d'une des villes les plus riches du monde, avec mes  habits  propres de rechange: chemise militaire allemande, tee shirt camo français, et... pantalon de toile propre mais recousu entièrement aux fesses (escalade d'un arbre en catastrophe dans le camp de Coët lors de l' intimidation insistante d'une laie)
Oui, même pas honte...
La paix, et l'Amour sont des habits de lumière...

Nous sommes 5 filles dans la chambre. Deux Suissesses (ou allemandes?) cyclistes (leurs copains dorment dans les dortoirs pour  hommes) , et deux jeunes Américaines bien bruyantes, mais qui me semblent fatiguées.
Elles n'ont qu'une carte non détaillée et non topo des rando possibles dans le coin, et je les entends blablater sur leur destination de demain.
Je me mèle de la conversation, et leur conseille l'aller retour à Pfälzerhütte.
Combien de temps?
6h mini
ahhhhhhhhhhhh hurlent elles!! trop pour nous!
Elles rigolent en voyant qu'ici on fait la différence entre "Wanderweg" (sentier de rando) et Bergwanderweg" ((sentier de rando en montagne)
Je leur explique la différence entre les deux: difficulté, risque, durée, équipement correct au niveau chaussure.
Allez y!! même si vous ne redescendez pas par l'Augstenberg (trop dur pour une première marche) vous ne le regretterez pas!!
Oui mais, 6h...
La fille me dit: ici, dans ce pays, tout le monde marche, court, pédale, fait du roller!! Histoire de dire ce sont tous des grands sportifs.
Elles se décident pour la montée vers le refuge 3h , puis la descente vers Himmel. çà a l'air facile, 750m de descente!
Facile oui, mais fatiguant pour les pieds. mais c'est beau, n'hésitez pas. Par contre, la remontée sur Malbun est terrible, 3 grosses heures de plus!
Ah bon? on prendra le bus.
Mééééééé, dis je, Himmel c'est l'Autriche, et Malbun le Liechtenstein. Entre les deux un mur infranchissable de plus de 2000m, çà m'étonnerait qu'un bus relie les deux villages!
Les deux filles finissent par décider que "elles verront demain, selon l'heure, et l'envie"
J'imagine qu'elles ont du monter à Sareis par le téléphérique, et redescendre doucement.
J'espère qu'elles auront apprécié.

La soirée est vite réglée. Réchaud, bolino, un petit détour par le mirabellier derrière l'AJ pour le dessert, et couchée à 21h30. Les deux cyclistes font de même à 22h, ce qui oblige les deux Américaines, respectueuses de notre repos, à faire dodo elles aussi.
Je sombre rapidement...

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Commentaires
L
Jipes, je te comprends.<br /> Rien de fou là dedans, de nombreux randonneurs grimpent ici tous les jours, ils ont une habitude de la rando alpine qui n'est pas la mienne.<br /> <br /> Quand à ta phrase :le courage de te dépasser de la sorte...<br /> Je ne peux répondre que çà:<br /> je ne me suis pas dépassée<br /> je me suis atteinte...<br /> <br /> Toute la Vérité est dans ce mot.<br /> j'aurais pu résumer tout mon long récit par ces deux phrases.
J
CA me fout la trouille ton récit je me vois sur cette pente complètement paralysé les jambes à la limite de la crampe et le dos inondé par la sueur de la peur de tomber, certainement pa sun truc pour moi même si je t'envie d'avoir eu le courage (La folie ?) de te dépasser de la sorte..........
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