Glaswald...

Enorme...
Je viens de rentrer.
Tout le long de la route, je pensais: j'ai l'impression d'être partie pendant des mois. Pas seulement 4 jours.
Tout est question d'intensité.
Il n'y a pas deux dimensions, ni trois, ni même quatre, avec la dimension temps.
Il y en a une autre, qui échappe à toutes les autres: la dimension "intensité".

Nous avons vécu ce que vivent les flocons de neige, exposés au soleil. Le temps d'un rayon, et puis s'en va.
Mais quel rayon...
Nous avons vécu, non pas en force, ni en puissance. Tout en légèreté, mais tout en intensité.

Je vous raconterai.

Le voyage terrible, le verglas, le froid, la neige, le ski...

Et le lac.
Ou du moins, ce qu'il en reste...
L'hiver a fait se glacer les sources, les cascades, et se taire le ruissellement sur les flancs des montagnes.
Alors le lac, qui alimente la rivière qui gambade jusque dans la vallée, s'est vidé lentement, sur plusieurs mètres de profondeur.
Vidé, et recouvert de glace, puis d'une couche de neige.
C'était énorme...
Le lac noir, devenu entièrement blanc, plus blanc que blanc, car cette étendue vierge et lisse ne porte aucune ombre.

J'ai marché sur le lac.
J'ai dit à mes enfants: "taisez vous, écoutez".
Ils ont dit "mais quoi"?
J'ai répondu: "écoutez le silence du silence"..

Aucun bruit, même pas un souffle d'air, tout était assourdi par la neige. Un silence intense.

J'ai marché dans la neige, le 31 décembre, lentement, vers le point de vue, et lentement j'ai contemplé le blanc.
Il a neigé dans la nuit du 31 décembre au premier janvier.
Nouvelle année, symbole qui me fait sourire. Qu'est ce qu'une année face à ces dimensions dont on ne trouve la porte qu'en ne la cherchant pas?

D'ailleurs, il n'y a pas de portes. Nous sommes nous même responsables de ces portes qui nous séparent de nous. Elles n'existent pas.

J'ai marché dans la neige vierge le 1er janvier, et je ne me suis pas sentie supérieure, à ainsi fouler l'infiniment pur.
Il a neigé sur mes pas.
Nos pas sont la mémoire de nos vies.
Il a neigé sur mes traces.
Le passé ne s'efface pas, même sous 30cm de neige.
Il entre juste dans une autre dimension, et fait place à aujourd'hui.

Il a neigé sur mes pas, et le cercle se referme.
J'ai vu le lac en octobre, crevant d'envie de mourir.
J'ai vu le lac en avril, marchant et marchant encore.
J'ai vu le lac en juillet et en aout, dans la lumière intense de l'été.
J'ai vu le lac si blanc, le dernier jour de l'année, le premier jour d'une autre.
Le cercle se referme, et ainsi commence un chemin éternel.

Il a neigé sur mes pas.
L'avenir n'est pas vierge de mon passé, il en est riche, et je suis riche de ce blanc né du noir.
Maintenant, je sais pourquoi ce coin de forêt se nomme Glaswald, la forêt de verre...
En hiver elle est pure comme le cristal.
Le lac noir s'est couvert de blanc, du noir est né le blanc, c'était logique.

Les étoiles sont les diamants du ciel.
Pendant que certains s'acharnent à gratter ceux de la terre, la neige, quand on sait la regarder, se couvre de diamants.
La neige est un cadeau du ciel.

Il a neigé sur mes pas, et j'ai bu la neige du lac, la neige du ciel, les diamants offerts, la neige posée sur les pierres d'habitude enfouies sous des mètres d'eau noire.
J'ai bu l'avenir vierge de ma vie...

Ce soir je vous offre deux photos.
La dernière photo du lac, prise du point de vue caché. Plein d'autres à venir, bien sûr!
Et une autre, de la forêt.
Que celui qui ose appeler çà "la Forêt Noire" lève le doigt.
Du noir nait la lumière, je vous en offre la preuve.
Glaswald, la bien nommée...

Comments

[Cornus]

Chère Laouen, je constate que tu as répondu à l'appel de la forêt. En fait, cela me fait plaisir car nul doute que cela devait être plus qu'une nécessité. Alors j'espère que c'est une bonne manière d'entrer dans l'année 2008 que je te souhaite aussi bonne que possible. Belles photos en tout cas. Du coup, les miennes risquent de praître bien fades...

[marie annick]

Je suis très contente que tu es bien rechargé tes "batteries" pour commencer cette nouvelle année - ainsi tu pourras repenser à ces quelques jours enchanteurs quand tu retrouveras ton travail - beaucoup, beaucoup n'ont pas eu ces moments de magie...

[Daniel Paillé]

Bravo...
Bize

[myrtille]

Wow ! Miam ! Houuu !
Et bonne année Laouenanig !

[Jean74]

Quel calme dans cette forêt ! C'était déjà le cas en été, mais avec la neige, on doit entendre le sang bourdonner aux oreilles ! Magnifique paysage et texte...sublime ! Bravo et bonne année, que ce dépaysement vous ait redonné du courage pour continuer.