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face au vent-avel a benn
7 décembre 2010

...

Le premier mot est difficile.

Cet endroit me semble complètement étranger, comme parfois je me sens étrangère à moi même.

J'ai quitté ce blog il y a plus d'un an. Suis revenue il y a quelques mois, effacer le dernier message. "Game over". Le jeu se termine, mais on a toujours la possibilité de rejouer. Un autre jeu, un autre rôle, des autres joueurs. Jouer, comme le disent si bien les pubs pour les jeux de fric sur internet, amène à la dépendance, et à la ... solitude. Etrange... Sourire.

En un an, j'ai tant frôlé la mort qu'elle me semble familière. En un an j'ai tant vécu qu'il me serait impossible de le raconter. Et surtout je n'en ai pas envie.

Je ne sais plus écrire, et je ne veux plus savoir écrire. La vie ce n'est pas une suite de mots, ni un poème, ni un mauvais roman. A force de me taire mon vocabulaire s'est réduit à quelques mots. Adieu les jolies phrases. Pour écrire comme je vis il me faudrait défoncer ce clavier, crever cet écran. Et me taire aussi.

Internet ne m'interesse plus. Je ne vais sur l'ordi que pour jouer parfois. Des jeux idiots, de patience. Des jeux de guerre aussi. Le sang gicle. Mais curieusement, quand on meurt, on recommence le jeu à la dernière sauvegarde. Parfaitement en vie. Totalement guéri, sans séquelles, sans cicatrices. On m'aurait menti?

Aucun soldat ne revient de la guerre sans blessure. C'est une citation de mon jeu de guerre, violent, sanglant, presque trop vrai.

Non, aucun soldat ne revient de la guerre sans blessure. Le soldat dont je partage la vie en est revenu de la guerre. Même si parfois j'ai l'impression qu'il y est encore. Surtout la nuit... Alors moi aussi je me bats, contre un ennemi invisible mais trop souvent palpable. Le passé. Le mien je l'ai rangé, çà va, merci. Le sien est collant comme du sang poisseux. L'ennemi invisible...

A l'âge où j'entrais en fac il ... Non, çà ne regarde personne. Silence...

L'Afghanistan continue à tuer des Français, même longtemps après leur retour. Tuer, détruire, faire sombrer, briser les couples... 

Nous sommes deux êtres à vif, qui ressentons tout "trop fort", qui parfois, nous déchirons à nous coller blessure contre blessure.

Je n'étalerai pas ma vie, et encore moins la sienne. Par respect, par pudeur, et parce que çà ne sert à rien. Et aussi parce de "çà", l'armée, la guerre, on n'en parle pas. Avis à mes lecteurs. Les commentaires trop précis seront supprimés. 

De l'armée je n'avais connu que le coté strass et paillettes. La représentation, la parade, les bals de fin d'année à C. Même là, j'étais trop vivante... A ma table, que des 5 galons, et moi trop vivante.Mon officier se foutait des convenances, me disait qu'il m'aimait, me prenait dans ses bras, mon Dieu, çà ne se fait pas!!! Mais mon marin avait trop l''habitude de plonger, et d’entraîner ses hommes avec lui. Il m'a fait couler... Même pas avec grâce, élégance, le petit doigt en l'air, non.

Peu importe maintenant... Je n'étais pas faite pour le strass et les paillettes. Moi, à Coet, c'était la boue que j'aimais. Courir en solitaire, dans la forêt, me faire courser par les laies, respirer à fond, grimper sur les crêtes, vivre. Je n'étais pas assez transparente pour lui... Peu importe.

A mon ex-mari remarquant "tiens, ta mère s'est encore trouvé un soldat"... ma fille avait répondu: "papa, ici, tu sais bien, y a que des bourges, ou des soldats". Logique. Il avait souri. 

Mais celui ci n'a jamais connu le strass et les paillettes. Celui ci a toujours fait partie du coté obscur de la force. Les régiments de combat. Réservoir de chair à canon... 

Celui ci n'a jamais fait math sup, ni math spé. Celui ci est descendu dans la mine de charbon à 16 ans, pour nourrir sa mère et ses deux frères. Et N de Dieu! qu'est ce que j'en suis fière! Depuis elles ont fermé, les mines... Étrange hasard. J'avais publié sur ce blog des photos de la mine de Forbach, en Moselle. Et voilà que je vis avec un enfant de là bas, qui a plongé dans cette mine là.

Mon soldat ne fait pas partie de la jet set du coin, grande famille, grande école, lignée d'officiers... Il s'est fait traiter trop souvent de sale petit Polak de merde. Et j'en suis fière. 

Je ne sais pas où nous irons... Parfois je ne sais même pas où nous sommes. Nous nous aimons aussi fort que nous nous déchirons. 

Cet été, sur mes sommets des Alpes, nous n'avons pas écrit notre amour sur les livres d'or. Tous ces mots écrits l'an dernier, et reniés quand l'automne fut venue...

Là haut, sur mon sommet à 3 frontières, là où l'amour de la montagne est né, il a écrit un message à ses frères morts en Afghanistan.

Raconter cette année passée, je ne peux pas le faire. Je n'en suis pas sortie indemne. 

Passer le 30 décembre le ventre ouvert, suite à une opération d'une tumeur abdo, c'est sympa non? Répondre à l'anesthésiste lors de sa consultation, à la phrase "avez vous peur du pire": "oui, j'ai peur du pire: me réveiller".. c'est... un bon résumé de ce que je vivais non? La mort, je l'ai côtoyée, je la côtoie encore, de manière plus insidieuse, moins directe. Elle n'ai plus forcément le gout de la vase, du sang, ou l'odeur de la poudre. 

Je paye encore. Mauvaise fracture, mal remise. Dos bloqué. Rien n'y fait. Je souffre le martyre depuis 6 mois. Mais depuis 6 mois j'ai en face de moi des yeux dans lesquels plonger les miens. Je lis dedans comme dans un livre, j'y lis l'amour, et la souffrance. Le regard qui parfois devient noir, impitoyable, ou perdu, ou carrément fou... Un peu comme le mien. Non, exactement comme le mien. Je me souviens avoir vu le même, sur quelques photos de Baudelaire, ou de Beethoven.

Je ne sais pas où nous irons... Tout ce que je sais, et c'est infiniment réconfortant, c'est que nous nous aimons. Et de çà j'en suis sure. Il ne me trahira pas dans quelques jours, ne reniera pas ce qu'il a dit ou écrit. Même si parfois ses mots sonnent comment des rafales de mitraillette.

Sur l'ordi, je suis un soldat perdu en pleine deuxième guerre mondiale. Obéissant aveuglément aux ordres, j'attaque, parfois de manière héroïque, le sang gicle, et j'achève les blessés. Dans la vie... je me sens parfois perdue. Je n'ai plus confiance en moi, je dois lutter souvent contre mes convictions profondes. Renier ce que je suis. 

Les mois d'insomnie se succèdent. Parfois, au matin, j'ai l'impression d'avoir combattu toute la nuit. 

Nous vivons fort, nous vivons vite... Inutile que je précise les chiffres qu'indique le compteur de la moto. Même pas peur, qu'elle dirait... 

Etre heureux, pourtant, c'est si simple. On pourrait vraiment l'être. Pourtant.... Les mois qui arrivent vont être durs. Impitoyables même. Je ne dirai pas pourquoi. Je ne sais pas dans quel état nous en sortirons.

Qui a dit "ni même si vous vous en sortirez"? Pour en sortir, il faut le vouloir.

Je le veux. Mais je ne suis qu'un être humain. On me croit forte, je suis faible, de cette force qui est ma faiblesse.

Décembre est toujours un mois difficile, pour les familles séparées, divorcées, recomposées, rafistolées. çà craque de partout.

J'aimerais fin décembre "monter" dans ce soin sinistré de Moselle, au pays du charbon mort, dans ces villes fantômes où la misère se traîne. A 100m de la maison de sa mère, la frontière allemande, en pleine forêt. J'y étais cet été. Nous revenions du lac, de "mon lac". J'ai été si heureuse de le partager avec lui.

J'aimerais passer la fin de l'année là bas, entre le regard noir de mon soldat, et celui bleu transparent de sa mère. Sourire en l'écoutant parler uniquement en polonais, même si je ne comprends que quelques mots, uniquement le sens des phrases. 

Me sentir en famille.

Enfin...


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Commentaires
I
Tu n'as pas perdu l'écriture, c'est toujours un plaisir de te lire...c'est marrant, ce qu'un clic de souris peu apporter...hier, une discussion avec une personne de mon village, qui sans me connaître (à l'époque en 2009) avait mis un com sur mon blog (en standbye aussi), je recherche ce com et sans grande conviction, je click de suite sur ton lien...et hop, je te trouve...et je souris...
D
Je t'embrasse très, très fort... NON, je VOUS embrasse tous.....
J
Je ne suis pas très fort pour la prose, mais je suis sincèrement heureux de vous lire. Je passais en douce de temps en temps.<br /> Puisse cette année vous être plus clémente. <br /> J'avais pensé à vous lorsque je marchais dans le chaos de Huelgoat, mais vous c'était dans la forêt de Brocéliande, je crois.<br /> Je me permets de vous faire la bise !
L
heureuse de te lire Doudou!!!<br /> je confirme: la statue de Jipitou est toujours là. Ma grande, bientot 18 ans, est interne au lycée de Ploermel depuis que j'ai déménagé à Vannes.<br /> Comme toi, je visite parfois les gens en loucedé. La vraie vie prend du temps ;)<br /> Je vous embrasse fort les filles, et vous aussi les gars!
S
t'as raison!!<br /> la statue du pape et toujours en place....et ma boutique est ouverte toute l'année!!<br /> :))))
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