Glaswald...(5)

Premier janvier. 10h.
En route vers le lac.
En redescendant, hier, je me suis jurée de ne pas y remonter par la même route. La descente avait été trop dangereuse.
Je crois bien qu'à pied j'aurais doublé ma voiture...

Oui mais: monter par où?
Je propose une idée, mais les enfants ralent. 12km à pieds ils refusent, trop fatigués par le ski, les soirées à se coucher tard, l'air vif.

Se taper 5,5km de bitume sur la route gelée empruntée hier, çà ne me tente pas.
Nous décidons de tenter la dernière solution, la montée par Freiersberg, 2,5km dont un bon kilomètre à 18% de pente moyenne.
Mais pour cela il faut arriver en voiture jusqu'à Freiersberg...
Je connais bien la route. La pente est de 10% en moyenne sur 6km environ. Et elle est si encaissée entre les montagnes qu'elle ne voit quasiment jamais le jour. çà promet donc de belles portions de verglas.
Nous tentons.

Après quelques mètres corrects, passées les dernières maisons de Schapbach, le décor est planté:

Que faire? Avancer, c'est toujours possible, c'est redescendre qui est dur.
Je continue.
Je sens que les enfants ont la trouille. Minimoi me demande plusieurs fois de me garer, pour continuer à pieds.
Mais va te garer sur une route aussi étroite! Faut encore trouver une entrée de sentier praticable!
Je finis par céder, et je fais demi tour en évitant de prendre l'option "descente directe 100m plus bas".

Je peste: ils ont refusé de monter par Holzwald, le coin où nous vivions cet été, pour éviter les 12km, mais là ils vont s'en taper 10, dont une belle partie sur le bitume...

Le soleil, pour me narguer, fait une courte apparition et illumine la route que nous venons péniblement de gravir.

Nous avançons lentement jusqu'à Freierberg. La route n'est pas plus verglacée que plus bas, mais les enfants se sentent plus en sécurité.
Il fait un temps somptueux. Bien plus froid qu'hier, mais c'est vivifiant. Le froid force à garder un certain rythme, sinon c'est la punition immédiate. Gla gla, et crève pour l'année complète.

Le parking de Freiersberg est à peine verglacé. Oui, à peine... Euh? ben oui, çà aurait pu être pire! Un mètre de glace sur la route par exemple, avec un blizzard à 120km/h, restons optimistes!

Nous entamons la montée vers le lac, qui je le répète dure environ 1,3 km et grimpe violemment. Particularité: 3 cassures, qui font qu'arrivés en haut de la partie montante on pense en avoir fini avec la pente, mais les derniers mètres nous font découvrir la partie suivante. La difficulté est croissante, et la dernière partie est interminable.
J'ai pris cette pente un certain nombre de fois, pour ne pas dire un nombre certain, et l'effet est toujours saisissant.
Le silence est total, et la neige totalement vierge.
Il a neigé cette nuit et aucun être humain n'a foulé cette neige.

Par contre, nous observons de nombreuses traces d'animaux.
Des traces de sabots, des chevreuils certainement.
Et des traces qui ressemblent à des traces de chiens, mais qui n'en sont pas car elles ne suivent pas le sentier, et plongent dans la forêt.
Certainement un gros renard, car le blaireau a une trace différente.
Des traces plus petites, des petits mustélidés certainement.
Nous croisons aussi des écureuils, et là, je m'interroge: ils hibernent quand les écureuils? On est tout de même en janvier, et il y a 10j il faisait -15 là bas!
Après quelques recherches sur internet j'ai lu que les écureuils terrestres hibernaient, mais pas les écureuils arboricoles.
M'enfin? Je ne pensais pas qu'il y avait une différence entre les deux. Ils sautent d'arbre en arbre, et galopent dans les sous bois.
Je n'y connais rien en écureuil, mais je peux vous dire que les écureuils noirs allemands n'hibernent pas, et sont très vifs! Sur la neige on ne peut pas les rater.

L'observation des traces aider à digérer la pente :-)

La couche de neige augmente logiquement avec l'altitude.
Je suis équipée de chaussures goretex, mais les enfants n'ont pas cette chance. L'investissement est lourd, j'attends qu'ils aient fini de grandir des pieds! :-)
Ils sont heureux de s'enfoncer dans la neige, mais plus tard ils vont souffrir des pieds, c'est certain.

Petit à petit, la pente se calme. Les sapins sont à peine recouverts de neige, mais ils semblent vraiment pétrifiés. Plus aucun souffle d'air ne fait chanter leurs branches.
Le ciel, bleu dans la vallée, est menaçant et gris. C'est un temps de neige.

Avant de descendre vers le lac (j'adore grimper pour redescendre) nous traversons quelques mètres de plat, rares par ici.
La luminosité est exceptionnelle. Ciel gris, blanc étincelant, regarder droit devant soi est quasiment impossible tant la réverbération est intense. Et encore, le soleil est absent!
C'est ici que j'ai fait la photo que j'ai posté en rentrant, le 2 janvier, pour vous montrer la lumière.

Qu'il est doux de passer sa tête sous les branches alourdies des sapins! Et quand la neige coule dans le cou, c'est encore mieux.

Tous les sentiers sont vierges. Nous nous sentons presque gênés d'y laisser nos traces.
Les enfants attaquent la descente.

Nous faisons un crochet par le point de vue.
Là, je souris en voyant mes pas d'hier recouverts de neige. Symbole du passé laissant place au présent, vierge.
Dans la descente vers le lac il y a parfois 30cm de neige, plus si on cherche bien. Les très jeunes sapins sont complètement recouverts de neige, et les rares feuillus  respirent tant qu'ils le peuvent encore. Bientôt, ici, il y aura plus d'un mètre.

Nous avons faim, il est temps de partager le repas, assis sur les racines à nu de mon frère-sapin, face au lac.

Comments

[Yoyo]

J'ai récupéré ça quelque part dans ton foisonnement de texte:
"Je vous souhaite sincèrement, bonheur, santé, rêves, envols...
Mais pas forcément "parce qu'on vient de changer d'année".
Aujourd'hui, demain, qu'importe le mois ou l'année."

Pareil...

Belle aventure pour les "petiots" et leur mère!

[laouen]

Pour les enfants, c'était une première! Ils ne connaissaient que la neige bretonne :-)
Moi, j'avais approché la neige dans ma jeunesse, sur le Mont Ventoux, mais les neiges du Sud ne sont pas celles de l'Est.
Avant avril 2007 je n'avais jamais vraiment vu la montagne sous la neige, et y marcher dans le silence avait été un voyage immense vers... plus loin.
Il me fallait faire découvrir çà à mes enfants.
J'espère qu'ils se souviendront longtemps de ce petit voyage, même si ce n'était que le début de l'hiver. Le même paysage sous 1m de neige doit être encore plus merveilleux. J'ai vu le Feldberg dans ces conditions, c'était inoubliable

[Cornus]

J'ai déjà vu ce genre de paysage, mais j'adore voir ça. Et tes photos sont superbes.

[Jipes]

Superbes paysages je t'envie un peu ;o) nous on a pas bougé (kévin a bossé toute la semaine)