An Oriant (1)
Ce soir, j'ai tant de choses à vous écrire...
Mais demain je commence à 5h30, et à 4h30 ensuite. Il va me falloir attendre.
Tant de choses à dire, et je ne sais pas par quoi commencer.
Je reviens d'An Oriant.
Ce nom me fait sourire. L'Orient... Pour une ville située tout à l'Ouest du vieux continent, il y a de quoi sourire non?
Bien entendu ce nom a une histoire, dont je vous fait grâce. Un port ancien, siège d'une compagnie de navigation vers les Indes, je crois bien... Et le nom est resté.
Lorient, tout à l'Ouest, était le port dans lequel on s'embarquait vers l'Est, l'Orient.
En breton: An Oriant...
Je n'y ai pas mis les pieds depuis 15ans. A cette époque je ne vivais pas en Bretagne.
Ville "neuve", rasée avec application par les alliés pendant la guerre, puis reconstruite.
Pourquoi? Parce qu'elle abritait la plus énorme base de sous marins allemands de France, et d'Europe (hors Allemagne): Keroman.
J'en reviens, mais là n'est pas le sujet.
Je désire y retourner depuis des années. Pourquoi je ne l'ai pas fait? Je ne sais pas... L'endroit auquel je pensais, je doutais de le retrouver comme je l'avais vu, il y a 15ans. Et j'avais raison.
Alors j'ai laissé passer les mois, puis les ans.
Quand la marée correspondait, le temps n'allait pas, et quand le soleil était là, la marée ne collait pas.
Il y a une semaine, sur le blog de Ar Valafenn je tombe sur un post sur la base de sous marins de Lorient, et là, je craque. Je lui pose la question qui me tourne dans la tête depuis des années.. et il y répond.
Alors je décide d'y aller, aujourd'hui, dimanche, car la marée est bonne, et tant pis pour le temps.
Durant la semaine, j'y pense.
Et vendredi, à l'usine, je reste sans voix.
Sur une palette, 500 pièces d'alu que je dois tourner. Pour les protéger des frottements, elles sont séparées par des couches de journaux. Le journal date d'octobre 2000. En prenant les pièces, une ligne me frappe:
"naufrage d'un chalutier, des disparus, des morts, etc..."
Je prends le bout de papier graisseux, et je lis: il s'agit de l'annonce du naufrage, en mer d'Irlande, de l'énorme chalutier "An Oriant"...
Ce bateau n'avait pas le droit de naviguer (histoire de visite technique etc). Il avait un problème de conception par mer forte, et les marins ont payé de leur vie un essaie de marée...
Le capitaine, survivant, a été condamné (sursis), les sociétés qui géraient le bateau ont pris une amende.
Les morts? Ils sont morts...
An Oriant s'appelait avant "Porz Theolen". J'en frissonne...
Porz Theolen est le plus beau port du monde (au minimum) quelque part, au nord du Cap Sizun. Un endroit microscopique, qui sent l'amour et l'océan.
Il n'y a pas de hasard...
Je pense à ceux qui ont plongé, pour ne jamais remonter, quand j'entre dans la ville...
Ce n'est pas exactement à Lorient que je vais. Je vais me perdre une bonne heure, sans plan, sans gps, et finir par demander ma route à une dame serviable qui me mènera quasiment où je désire aller.
Ma fille me dit: cet endroit me rappelle quelque chose...
Tu n'y es jamais venue pourtant...
Je suis au bout du bout de la mer, ou au bout du bout de la rivière, c'est au choix.
Un endroit perdu, qui l'est moins maintenant. Quelques bateaux de plaisance, un petit théatre de plein air...
Ici, dans une ville qui il faut l'avouer n'est pas franchement touristique, se trouve un des endroits les plus bouleversant de la Bretagne maritime.
La fin d'une époque. Mais une fin qui n'en finit pas...
Depuis 1920 ils sont là.
Ici, çà ne sent pas l'amour et l'océan.
çà sent la mort, et l'océan. L'océan de vase.
Et c'est très bien ainsi.
Et il ne doit pas en être autrement...
Je vous en parlerai demain, je n'ai pas vu les photos. Le temps était gris, l'appareil a détesté.
Pour l'instant, je vais aller manger un peu, et poser ma tête sur:
LO rayé
:-)
ok, je sors...