Constat
J'ai commencé mon travail il y a 10 jours.
Cette nuit, j'ai dormi une ou deux heures. Deux heures pendant lesquelles j'ai du me réveiller 4 fois, en plein cauchemar.
Le reste de la nuit, je l'ai passée avec le coeur qui battait trop vite, trop chaud, angoissée, à tirer des constats des constats.
Et à tourner... Je tourne toute la nuit. En rêve, et éveillée.
Ce boulot, en plus d'être éreintant, est stressant.
Je prends soin de ma machine, je suis consciencieuse, je m'intéresse à ce que je fais, mais çà ne fait pas tout.
Il faut savoir maitriser en 30 secondes un geste que l'on acquiert après 10ans de métier. Et bosser vite, très vite.
Hier soir, quand mon remplaçant de l'équipe de nuit a découvert le travail qui lui était réservé, il a attendu que j'ai le dos tourné pour piquer une crise.. Pour ne pas m'angoisser un peu plus.
Son collègue de nuit m'avait dit 5 min avant: je vais l'entendre gueuler toute la nuit, je sais même pas si il ne va pas rentrer chez lui avant la fin..
Cet homme a 40 de métier, bosse vite et très bien, mais sait reconnaitre un travail de merde. Surtout que cette pièce là, il la connait!
Moi... 7 jours.
Je vais faire comment aujourd'hui?
A côté de cet aspect, il y a tous les autres:
Je ne vois plus mes enfants.
Ils en profitent...
Ma maison est un chaos indescriptible. Car les enfants en rajoutent, et car je n'ai pas le temps ni la force de tout faire.
J'aimais l'ordre relatif qui y régnait...
Le sport est important pour mon équilibre: je n'en fais plus du tout. Trop épuisée, et pas le temps.
Le jardin: pareil. Il va redevenir une jungle rapidement.
Plus grave, ce sont les effets sur ma santé.
Ne pas dormir une nuit, c'est être KO debout la journée d'après.
Devant une machine, c'est dangereux. Déjà j'ai du mal à tenir 8h.
Ne pas dormir, avec ce genre d'insomnies, c'est se coucher ce soir avec l'angoisse de ne pas dormir.
Et on retombe...
Cercle vicieux: au moins on dort, au plus on angoisse de ne pas dormir, et au plus on angoisse, au moins on dort.
J'ai connu çà. Je ne travaillais pas, mais je ressemblais à un zombie, nuits et jours.
Là, je vais tenir combien de temps?
On me répondait: il faut t'épuiser.
Je faisais du sport!
Et là, je ne suis pas encore assez épuisée peut être?
Je suis censée bosser pour être "respectable".
Je m'en tape.
Je suis censée bosser pour renflouer mon compte en banque.
Quand je serai en pleine dépression nerveuse, hospitalisée, mes enfants s'en sortiront seuls?
Je suis censée bosser pour avoir une vie sociale: je n'ai plus de vie du tout!
Alors je fais quoi?
Je n'ai pas le choix... Faut bosser. Bosse ou crève? Ou bosse et crève?
Lire Lao Tseu pendant la pause, et planer aile dans aile avec sa machine de temps en temps, admirer les ipomées le matin, çà ne fait pas tout. L'être humain que je suis à beau se sentir "être", il n'en reste pas moins humain.
Et l'humain, dans mon cas, il en a plein le cul.